L'ANADAVI, l'ANAMEVA et l'ANADOC signe une lettre ouverte pour refuser qu’un barème établi dans l’intérêt des assureurs ne soit imposé aux victimes de dommages corporels :
Les acteurs de la réparation du dommage corporel connaissent l’importance du rapport d’expertise médico-légal.
Ce document repose en particulier sur l’évaluation d’une incapacité fonctionnelle qui ne saurait exister sans un barème d’évaluation médico-légal du taux d’incapacité.
Ainsi sans barème, pas de taux d’incapacité séquellaire et sans taux d’incapacité séquellaire pas de traitement des préjudices de la victime.
Ce barème est si déterminant qu’il est indispensable qu’il soit :
- rédigé de manière contradictoire
- consensuel et accepté par tous les praticiens de l’expertise
- transparent dans ses modalités d’élaboration et de de diffusion
Récemment, les praticiens du dommage corporel ont découvert un nouveau barème d’évaluation médicolégal co-édité par Concours Pluripro et la Revue Française du Dommage Corporel et présenté comme « un recueil des publications parues régulièrement dans la Revue Française du Dommage Corporel depuis 2021».
Or même si l’objectif d’actualisation des barèmes est légitime, celui-ci n’est ni consensuel ni transparent.
En effet, ni la SFML (Société Française de Médecine Légale), ni l’ANAMEVA (Association Nationale des Médecins-conseils de Victimes d’Accident avec dommage corporel), ni l’ANADOC (Antenne Nationale de Documentation sur le Dommage Corporel), ni l’ANADAVI (Association Nationale des Avocats de Victimes de Dommages Corporel) pourtant acteurs
majeurs, incontournables, de la problématique médicolégale n’ont participé à son élaboration.
La SFML a même indiqué sur son site :
Ce barème, présenté comme l’actualisation de celui du Concours médical 2001, interroge sur sa transparence.
Aucun de ses auteurs ne précise ses qualités et fonctions alors pourtant que les « médecins rompus à l’exercice de l’évaluation du dommage corporel qui ont travaillé à l’élaboration » du barème, dirigé les travaux, coordonné la rédaction et harmonisé les taux retenus sont habituellement missionnés par les organismes débiteurs de l’indemnisation, assureurs ou fonds de garantie.
Leurs liens d’intérêts avec les débiteurs d’indemnisation ne sont pas déclarés, contrairement aux règles de bonnes pratiques en matière de publications médicales, définies notamment par la Haute Autorité de Santé.
Le résultat de ce travail aboutit à un barème qui annihile certains progrès majeurs du droit de la réparation en prétendant amalgamer tous les éléments du déficit fonctionnel permanent dans un taux unique d’AIPP.
Par une sorte de tour de passe-passe, les auteurs de cet outil le présentent comme la continuité du précédent , tout en privant les victimes d’une évaluation individualisée et intégrale.
Pour quelles raisons les assureurs, qui exigent déjà l’utilisation d’une mission d’évaluation dégradée (mission dite AREDOC) imposeraient-ils maintenant un barème fixant les imputabilités et excluant en pratique une appréciation in concreto du déficit fonctionnel permanent ?
L’utilisation de ce barème aboutirait à nier vingt ans d’évolution du droit de la réparation, au détriment des victimes.
Il n’est évidemment pas question de remettre en cause la liberté des assureurs de travailler de leur côté à la question délicate et technique de l’évaluation des séquelles des victimes.
Mais il est inconcevable qu’un barème d’évaluation médicolégal établi unilatéralement par les régleurs puisse devenir la référence de l’évaluation des séquelles des victimes.
A défaut, il s’agirait là d’une violation du principe fondamental d’égalité des armes devant la justice (Article 47, Charte des droits fondamentaux de l’UE ; Article 6, § 1 Conv. EDH).
L’ANADOC, l’ANAMEVA et l’ANADAVI appellent de leurs vœux l’élaboration d’un barème consensuel par un groupe de travail paritaire composé de tous les acteurs des procédures d'indemnisation des victimes : régleurs et médecins conseils désignés habituellement par des assureurs, avocats et médecins conseils désignés habituellement par des victimes, magistrats et experts judiciaires.
Paris, le 15 juillet 2025
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